Comme Agnès qui, en dix huit mois, a dépensé près de
900 € dans la librairie où elle avait fini par découvrir, après enquête poussée, qu'"il" travaillait.
"C'était à un mariage à Avignon. Lui, c'était le copain d'une cousine de la mariée. Moi, j'étais invitée par le marié. Je n'ai pas osé l'inviter à danser, c'était impossible, les deux bandes (celle du marié, celle de la mariée) ne se sont pas mélangées de la soirée.
Bon, je finis par savoir qu'il travaille dans une librairie à Marseille. Je les ai toutes faites. Rien. Comme je ne voulais pas me retaper le voyage pour rien -j'habitais à Orange-, je les ai toutes appelées. J'ai trouvé. Et j'ai pris l'habitude d'aller voir ma soeur toutes les semaines à Marseille ! Et d'acheter un livre dans la boutique de ce garçon.
Je lui demandais conseil, à lui et pas aux autres. J'ai lu tout ce qu'il aimait. Des trucs assez prise de tête, des trucs géniaux dont je pouvais lui parler. Ça a construit notre relation, assez littéraire, faite de plein d'histoires.
Il a fini par faire attention à moi, et quand j'ai eu le courage de lui dire pourquoi je faisais 2 300 km par semaine, ça l'a scié. Ça l'a rendu amoureux de moi."
Agnès avait 34 ans. Et cette fille honnête et persévérante admet qu'avant son libraire de mari, elle a perdu du temps.
Un ingénieur dans le pétrole pour lequel elle a dépensé des fortunes en téléphone (il a été muté en Indonésie deux jours après leur rencontre). Six mois de coups de fil "amicaux" (il croyait que je l'appelais du boulot), et à son premier retour en France il passe ses vacances... avec ses parents.
Elle a attendu le second retour, un an plus tard, et elle est allée l'attendre à l'aéroport : "Il se doutait de quelque chose. Je pense qu'il s'est cru obligé de venir boire un verre chez moi et de coucher. Un fiasco. J'ai mis six mois à décrocher."
Avant l'ingénieur, il y a eu un prof de gym dont elle a été littéralement folle. "J'ai lancé notre relation sur le mode:
nous sommes deux provinciaux perdus dans un lycée de la banlieue parisienne, serrons-nous les coudes".
J'ai enduré pendant un an des déjeuners ou des cafés où il était d'abord question du mal du pays (il était breton), puis du mal du pays d'une copine (une Bretonne) puis de ses magouilles pour être nommé là-bas (en Bretagne), puis du mariage avec la copine. J'étais coincée, enferrée dans mon rôle de confidentes. Il ne s'est rien passé."
Elle n'a pas vraiment de regrets pour l'ingénieur en pétrole, " un immature qui n'a pas lu plus de trois romans dans son existence ". Mais, pour le prof de gym, si. Enormément."Je lui plaisais, j'en suis sûre. On aurait pu passer une année agréable."