Nous apprenons à exprimer l'agressivité en
utilisant un registre de comportements.
Cela commence à l'école
maternelle: «Tu me pousses, je te pousse. » C'est la réponse primaire qui
correspond au couple action‑réaction. C'est la loi du talion: oeil pour
oeil, dent pour dent. Ou celle de la légitime défense.
Inutile de chercher à qui revient la faute
ou qui a commencé.
Progressivement, un incident anodin s'est
amplifié pour devenir une chose monstrueuse. Interrogez donc un couple
adepte de la guérilla permanente. Ils sont bien incapables de vous dire
pourquoi ils ont remplacé l'amour par la guerre !
Le transfert représente un autre mode
d'expression de l'agressivité. C'est facile, il suffit de trouver une
victime, si possible quelqu'un qui ne vous a absolument rien fait.
L'histoire du coup de pied au chien
L'exemple le plus connu est celui de ce père
de famille sur le pantalon duquel son gamin renverse un bol de chocolat en
prenant son petit déjeuner. Obligé de se changer, mis en retard, notre
homme arrive de méchante humeur à son bureau, et il s'en prend à la
première personne qu'il rencontre, en l'occurrence son chef. Ce dernier,
ne comprenant pas ce qui lui arrive, passe à son tour ses nerfs sur sa
secrétaire. Celle‑ci passe une mauvaise journée et, de retour de son
travail, envoie balader son mari qui a eu le malheur de lui demander:
«Qu'est‑ce qu'il y a pour dîner ce soir, ma chérie ... » «Tu n'as qu'à
préparer ton dîner toi‑même, je ne suis pas ta bonne!» réplique‑t‑elle.
Devenu agressif à son tour, le mari gifle son
gamin parce qu'il lui a lancé un ballon dans les jambes. Et notre petit
bonhomme, qui n'a aucune raison de se sentir responsable du bol de
chocolat qu'un autre gamin a renversé sur le pantalon d'un papa qui n'est
pas le sien, n'a plus d'autres ressources, pour évacuer l'agressivité dont
il est lui aussi l'objet, que de donner un coup de pied au chien... qui
passait par là.
Nous avons tous donné un jour un coup de pied
au chien. Et si nous n'avons pas un animal sous la main, c'est le gamin ou
la collègue de bureau qui va supporter notre trop plein d'agressivité. Il
existe même des victimes toutes désignées qui, par sentiment d'infériorité
ou pour éviter tout conflit, acceptent de servir de bouc émissaire.
Il faut donc être vigilant et veiller à ne pas
prendre à son compte l'agressivité de son conjoint, de ses enfants ou de
son patron.
Ils en prendraient vite l'habitude et ils trouveraient commode
de se décharger sur vous et de vous utiliser comme une station‑service
pour vidanger leur stress et recharger leurs batteries. Votre énergie
n'est pas inépuisable et vous aurez tôt fait de vous retrouver
complètement à plat.
Il faut aussi apprendre à répondre de la
manière la plus appropriée. Ainsi, sans le savoir, vous rendez un grand
service au type qui vous bouscule et auquel vous demandez de s'excuser. En
répondant à son tour avec violence, il décharge sur vous son agressivité
accumulée durant toute journée et, en fin de compte, il sortira peut‑être
détendu de cette altercation. Vous avez joué auprès de lui le rôle de son
chef de service ou de sa femme, et vous risquez de vous retrouver encore
plus stressé pour le restant de la journée. Bon d'accord, il ne faut pas
se laisser marcher sur les pieds, mais est‑ce une raison pour servir de
soupape à tous ceux que l'on rencontre ?
Certaines personnes
accumulent les agressions sans laisser paraître la moindre émotion. Mais
lorsque la coupe est pleine, tout jaillit d'un seul coup. Il ne reste rien
d'autre à faire que laisser passer l'orage. Inutile de résister, ce n'est
que lorsque tout sera sorti que vous pourrez enfin tenter de vous
approcher.