En utilisant son agressivité, l'homme ne fait preuve
d'aucune originalité, puisque, comme toutes les espèces animales, il
adopte un comportement de défense territoriale, à l'instar du chien qui
aboie et montre ses crocs, du chat qui dépose un peu partout des marques
odorantes, ou du gorille qui tambourine sur sa poitrine pour impressionner
les intrus qui marchent sur ses plates‑bandes...
Le patron, qui pousse un
coup de gueule pour bien montrer qu'il est le chef, et l'adolescent, qui
claque bruyamment la porte de sa chambre et branche sa sono à fond,
adoptent également sans le savoir un comportement de défense territoriale.
Il est indispensable et même vital que l'homme exprime son
agressivité, car à partir du moment où les tensions intérieures deviennent
trop fortes, elles doivent nécessairement trouver une voie par où
s'échapper.
Les empêcher de sortir, les refouler, entraîne à coup sûr des
phénomènes de somatisation, c'est ainsi que l'on appelle les maladies
physiques qui apparaissent sans véritables causes apparentes mais qui sont
toujours liées à un état de tension ou de nervosité intense.
Qu'il s'agisse d'ulcère d'estomac, d'eczéma ou même
d'herpès, tous ces troubles ont une origine psychologique.
Pour y
échapper, certains ont recours à ce qui peut paraître la solution idéale:
«Pour vivre heureux, vivons cachés... » Isolé, calfeutré derrière une
porte fermée à double tour et des volets clos, on réduit effectivement
bien des sources d'agression !
Mais il est difficile, dans ces conditions,
de mener une vie sociale normale, et on risque rapidement de se voir
traité de schizo par ses amis.
Qu'on se rassure pourtant, ce n'est pas parce que l'on aura
envie parfois de se laisser aller, de traîner en robe de chambre, de
décrocher le téléphone, de prendre un bon bouquin, de se nourrir de
sandwichs et de boîtes de conserve pendant un week-end que l'on va sombrer
dans cette grave maladie mentale qu'est la schizophrénie.
Il est
nécessaire de temps en temps de savoir recharger ses batteries en
s'isolant pour éviter de disjoncter. Le véritable schizophrène, lui, est
complètement coupé du monde réel. Replié sur lui‑même, il vit un rêve
intérieur, et aucun événement ne peut le ramener à la réalité. Inutile
d'essayer de l'en sortir, il est parfaitement insensible aux
sollicitations comme aux agressions.